Splann - Lanceur d'enquêtes se sent curieux à Paimpol.
Un décret paru le 10 juillet au Journal officiel définit « les travaux dont l'exécution ne peut être différée » comme étant « les récoltes réalisées manuellement en application d'un cahier des charges lié à une AOC ou IGP ». Pour celles-ci « le repos hebdomadaire des salariés peut être suspendu une fois au plus sur une période de 30 jours ».
Des parlementaires Horizons, LR et RN avaient réclamé cette décision, relayant une demande de certains vignerons. Par ricochet, ce texte — signé par le Premier ministre deux jours après la défaite du camp présidentiel aux législatives — signe un recul des droits sociaux pour les saisonniers ramassant le piment d'Espelette, l'oignon doux des Cévennes... ou le coco de Paimpol.
La direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités des Côtes-d'Armor (DDETS 22) a confirmé à « Splann ! » l'application de cette disposition pour les ramasseurs de ce haricot blanc AOC, dont l'aire de production s'étend sur 85 communes du Trégor.
« Une nouvelle fois les réalités économiques priment sur la santé des salariés », dénonce l'Union syndicale Solidaires.
« Travailler en plein air en période de forte chaleur voire de canicule comporte des risques pour la santé », renchérit la CGT des Côtes-d'Armor. Le syndicat s'inquiète aussi pour l'accord signé au terme d'un long bras de fer avec la FDSEA.
Depuis 2017, le salaire brut à l'unité est obtenu par référence à une durée de 7 heures par jour pour lequel un rendement de 120 kg doit être récolté. La rémunération ne doit jamais être inférieure à celle qui aurait été perçue si le salarié avait été rémunéré au temps.
« Les heures supplémentaires n'étaient pas prises en compte [par l'accord de 2017.] Or, la suppression du repos dominical conduit forcément à l'émargement d'heures supplémentaires », relève la CGT, qui demande donc, a minima, leur prise en compte. À notre connaissance, ni la FDSEA 22, ni Les Maraîchers d'Armor (ex-Union des coopératives de Paimpol et Tréguier), n'ont encore réagi.
Ce sont essentiellement des travailleurs étrangers, en particulier d'Afrique de l'Ouest, qui assurent le ramassage des cocos de Paimpol. Parfois sans papiers, ils sont peu susceptibles de faire valoir leurs droits, comme l'a documenté l'émission Envoyé spécial, en décembre 2023.