Les luttes féministes, des luttes pour renverser le capitalisme
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Intervention de Betty Collober, candidate sur la liste « Pour un monde sans frontières ni patrons, urgence révolution ! » à la réunion publique du 21 mai 2024 à Rennes
Bonsoir, merci à toutes et tous d’être parmi nous ce soir à ce meeting du NPA-Révolutionnaires. Nous avons déjà évoqué et nous continuerons à dénoncer ensemble les guerres, la colonisation, l’exploitation au travail et les nombreuses violences induites par le capitalisme. Moi, j’avais envie de vous parler d’une violence qui touche nos collègues, nos mères, nos sœurs, nos voisines… et qui pourrit en fait toute la société. Il fallait qu’on vous parle ce soir de la lutte contre les violences faites aux femmes.
Parce que Macron a beau essayer de nous faire croire qu’il est féministe, en faisant panthéoniser Simone Veil, on n’oublie pas le soutien qu’il a apporté à l’odieux Depardieu, en remettant ainsi en cause la parole des femmes ! On n’oublie pas non plus que c’est la France et son gouvernement qui ont bloqué la redéfinission du viol dans les textes européens pour intégrer véritablement la notion de consentement.
Inégalités
Bien que Macron ait affirmé faire des femmes la grande cause du quinquennat, la réalité pour les femmes aujourd’hui n’a pas foncièrement changé depuis son arrivée au pouvoir, c’est même pire. Pas un seul jour ne passe sans un crime d’horreur commis dans le monde. En France aussi on tue des femmes. Depuis le début de cette année, au moins 39 d’entre elles ont été victimes de féminicides, chaque année c’est 200 000 femmes qui sont victimes de violences conjugales. Et ces chiffres ne cessent d’augmenter. Les grandes puissances impérialistes occidentales vont soi-disant défendre la démocratie dans le monde, et finalement ne font qu’appuyer ou ouvrir la voie à des régimes réactionnaires comme celui des talibans en Afghanistan, ou des mollahs en Iran dont on sait le traitement qu’ils réservent aux femmes. Face à ça, nous affirmons notre solidarité avec toutes les femmes du monde entier, surtout celles qui luttent aujourd’hui contre ces régimes réactionnaires. En Iran ce sont justement les femmes qui se sont soulevées suite à la mort de Mahsa Amini et qui manifestent auprès des hommes en grève : ensemble ils luttent pour un changement radical de leur société.
Mais derrière les violences les plus crasses, c’est aussi toujours la surexploitation des femmes dans les emplois les plus précaires, les moins bien payés, les plus durs et pourtant les plus essentiels. Si on regarde bien, les femmes sont majoritaires dans les emplois du soin, du ménage, de la confection de vêtement, de la garde d’enfant, etc. Et, sacré coïncidence, ça ressemble drôlement à ce qu’elles font à la maison, comme si elles occupaient ces emplois plus facilement parce qu’elles auraient des capacités « innées » à prendre en charge ces tâches… C’est sur ces idées sexistes que les capitalistes s’appuient pour justifier que les femmes occupent les postes les plus précaires. Non, il n’y a pas que les réactionnaires à la Zemmour ou à la Trump qui alimentent les préjugés sexistes en assenant que l’inégalité des genres serait naturelle et que les femmes devraient rester à la maison. Si le capitalisme ne va pas toujours aussi loin, ça reste tout de même tout un système économique, qui utilise allègrement l’ensemble des femmes, sur la base de ces idées-là. À sa manière, lui aussi voudrait nous faire croire qu’elles sont inférieures aux hommes et cela depuis des siècles. Parce que ça lui profite. Par exemple, on se retrouve avec des aides-soignantes, dont 91 % sont des femmes, propulsées à des postes où elles apprennent en faisant, au détriment des patients mais aussi de leurs collègues. Pas besoin de les former, donc pas besoin de bien les payer non plus. À la CAF de Nantes où je travaille, mes collègues et moi, qui sommes aussi une majorité de femmes, accueillons un public précaire, avec des histoires de vie complexes et qui doivent faire face au mur de l’administration. Pour les accompagner au mieux, nous devons faire preuve de bienveillance, d’écoute et de pédagogie, mais visiblement toutes ces qualités ne sont pas reconnues par notre direction puisque nous sommes payées à peine plus que le Smic.
Du berceau jusqu’au tombeau, nos vies ne valent pas plus que leurs profits. Alors pour vivre plutôt que survivre, au NPA-Révolutionnaires, nous revendiquons des embauches massives dans tous les secteurs, pour les femmes, mais pas uniquement. Que toutes et tous soient formées décemment pour exercer son métier sereinement. Pas un salaire en dessous de 2000 euros, c’est la seule condition matérielle réelle qui permettra aux femmes de ne dépendre que d’elles-mêmes, et non d’un père, d’un mari ou d’un conjoint violent ! Nous revendiquons aussi des mesures immédiates, telles que de véritables moyens financiers pour des hébergements d’urgence. Aujourd’hui, quatre femmes sur dix qui ont demandé une solution d’hébergement pour finir la cohabitation avec leurs agresseurs n’ont pas reçu de réponse. C’est inadmissible ! Non, il n’y a rien de naturel dans l’inégalité hommes-femmes. Rendez-vous compte, dans le secteur privé les femmes gagnent en moyenne 23,5 % de moins en revenu salarial annuel ! Ce qui explique, par exemple, l’écart des salaires entre les hommes et les femmes, c’est la nature même du système capitaliste, qui cherche à tirer les salaires de tous vers le bas pour augmenter les profits d’une minorité. Augmenter les salaires des femmes c’est refuser la concurrence entre les travailleurs et les travailleuses, c’est revendiquer une augmentation pour toutes et pour tous, un revenu décent pour une vie décente.
Qu’elles y travaillent ou non, c’est d’ailleurs l’ensemble des femmes qui paient en premier la destruction du système de santé, comme toutes les attaques anti-sociales. Les centres hospitaliers qui pratiquent les avortements sont saturés, les centres d’IVG ferment les uns après les autres, car jugés « non rentables ». Le droit à l’avortement est inscrit dans la Constitution ? Ça nous fait une belle jambe ! Dans les faits, beaucoup trop de femmes ne peuvent pas ou difficilement y avoir accès. De même, dans un récent documentaire Arte sur la santé des femmes, on apprend que, durant leurs études, les médecins n’ont que très peu de formation sur la spécificité du corps des femmes, ce qui implique des diagnostics tardifs, des symptômes qui ne sont pas pris au sérieux et à terme le décès de certaines patientes ! D’ailleurs qu’on se le dise, l’avortement, comme la majorité des droits des femmes, en réalité, on ne nous l’a pas donné, il a été conquis par des luttes, des luttes de femmes. À l’image du mouvement des femmes en Argentine qui sont descendues massivement dans les rues, et qui ont obtenu le droit à l’avortement en 2020 seulement et qui continuent de se battre pour préserver ce droit suite à l’élection de Javier Milei ! Il faut qu’on soit clair, aucun de nos droits et surtout pas ceux des femmes ne peuvent être inscrits dans le marbre dans le système capitaliste, car à la moindre crise, au moindre reflux de nos luttes, tout ce que l’on a acquis peut nous être repris. Alors, comme ces femmes qui luttent, au NPA nous réaffirmons le droit à l’avortement et à la contraception, libre, gratuit et accessible à toutes. La nécessité de nous battre ensemble, dans des mouvements massifs, non seulement pour protéger nos droits, mais aussi pour en obtenir d’autres, et encore mieux, pour la construction d’une société dans laquelle ils ne seraient jamais remis en question. Et pour ça, oui, nous on revendique haut et fort que l’émancipation des femmes est un combat révolutionnaire.
Violences
Un combat que nous sommes seules à pouvoir mener, car ce gouvernement, comme les précédents, peut bien tenter de calmer notre colère avec des annonces spectaculaires, dans la réalité leurs mesures ne sont jamais à la hauteur des besoins. En décembre dernier une nouvelle allocation aux victimes de violences conjugales a vu le jour, sous l’égide des CAF. De l’argent, d’accord, mais quel accompagnement ? À Nantes, par exemple, les besoins ont été totalement sous-estimés. La direction pensait recevoir une dizaine de dossiers de demande, on en a reçu une centaine le premier mois. Les techniciens en charge des dossiers mais surtout les assistantes sociales ont vite été débordées et ont dû pallier ce manque de préparation pour ne pas impacter trop profondément les femmes. Ces femmes, ce sont d’ailleurs mes collègues et moi qui les recevons, au début dans le brouhaha de l’accueil et désormais, parce que nous l’avons réclamé, dans un bureau à l’écart, au calme : c’est la moindre des choses ! Mais encore une fois, nous n’avons qu’une heure de formation technique sur cette aide, la veille de son lancement, n’incluant même pas la question des violences conjugales. Des belles annonces, mais du bricolage sur le terrain au détriment des femmes et des travailleurs qui les accompagnent !
Ce gouvernement se dit féministe, mais c’est pourtant lui qui, par la voix d’Aurore Berger, menace de couper les subventions aux associations qui témoignent leur soutien à la cause palestinienne. Ce gouvernement qui laisse couler l’association « Du Coté des Femmes » dans le Val d’Oise, condamnant ainsi 60 travailleurs du secteur social au chômage et tout un département à se retrouver sans association pour les femmes victimes. Quand il s’agit de sauver les capitalistes, on sait sortir le portefeuille. Mais pour une association endettée, soudain, il n’y a plus d’argent magique !
Le fond du problème c’est que, non, le capitalisme n’a pas inventé le sexisme, mais il s’en nourrit, il le prolonge à sa manière et pour ses propres intérêts. Parce que ce système capitaliste, le système le plus avancé de l’histoire, c’est aussi celui qui engendre le plus de guerre, de misère, d’inégalités, dont les femmes sont les premières victimes. C’est parce qu’il est construit précisément sur la propriété privée qu’il a fait du corps des femmes d’abord une propriété. C’est parce qu’il est basé sur l’exploitation de l’homme par l’homme et des rapports de domination, qu’il les décline à tous les niveaux. Et tout est bon pour opprimer toujours plus les travailleurs et travailleuses, pour les mettre en concurrence, les diviser. Les femmes, les hommes, les Français, les étrangers, les bons et les mauvais migrants. Si les luttes féministes ont une histoire liée à celle des luttes d’autres couches opprimées de la société, c’est bien parce que c’est le même système capitaliste qui les exploitent et continue d’enraciner à sa manière toutes les inégalités et les oppressions.
Mais, heureusement pour nous, le capitalisme lui non plus n’a rien de naturel, la loi du profit et de la concurrence n’est pas une loi de la nature, et la misère qui en découle n’est pas une fatalité ! Si le capitalisme maintient ces oppressions et ces divisions, c’est qu’il y voit un moyen de nous affaiblir, de nous faire taire, de nous empêcher de nous révolter contre son absurdité. Les violences sociales, sexistes, racistes, homophobes, etc. lui permet de rester en vie. Il existait des sociétés avant le capitalisme, il peut en exister après lui : celle que nous pouvons construire et que nous touchons parfois du doigt dans nos luttes. Le combat des femmes est celui de tous les opprimés, il ne peut pas être un combat détaché de la lutte anti-capitaliste ! Les femmes doivent se saisir des idées révolutionnaires, c’est seulement avec cette arme-là, en se refusant d’être les éternelles sacrifiées, qu’elles pourront transformer concrètement leur vie, et entraîner derrière elles l’ensemble de la société.