lundi 14 août 2023

SOULEVEMENT

 édito de la semaine.

Un désaveu pour le pouvoir, ça recharge nos batteries pour la suite de nos combats !

La décision du Conseil d’État d’annuler la dissolution des Soulèvements de la Terre qu’avait décidée Darmanin avec l’appui de Macron est une gifle pour le pouvoir. La politique de la matraque et les restrictions des libertés démocratiques comme seules solutions à l’urgence sociale ont fini par agacer y compris le Conseil d’État, une institution pourtant bien peu favorable aux mouvements sociaux et aux organisations anticapitalistes. Ce petit comité non élu est en principe le gardien de l’esprit des décisions de l’État, c’est-à-dire de la loi du plus fort, de la propriété des riches, en un mot de l’ordre bourgeois. Macron est désavoué même parmi les siens.

La véritable signification d’une annulation de dissolution

La chose n’était pas gagnée pour la coalition d’organisations et collectifs regroupés sous le nom de Soulèvements de la Terre. Les accusations inventées pour justifier la dissolution étaient lourdes. Cette alliance militante écologiste s’est opposée aux grands projets inutiles et aux plus graves conséquences d’une agriculture capitaliste responsable de la destruction de la nature et de la ruine des petites exploitations. Ce qui gênait Macron et son gouvernement, c’était bien sûr cette opposition sur le terrain par de massives mobilisations, mais aussi la liaison entre la question écologique et le combat pour une autre société. Les actions des Soulèvements de la Terre étaient publiques. Alors comment les interdire ? Le ministre de l’Intérieur, Darmanin, peu soucieux des libertés des opposants et très ambitieux pour sa carrière, a joué la carte qu’il affectionne : la répression. Alors, pour dissoudre un mouvement militant agissant dans le cadre légal, il fallait insulter la réalité avec une accusation « d’éco-terrorisme ». Cette assimilation au terrorisme meurtrier serait risible si elle n’était pas le signe d’un pouvoir macronien en difficulté, prêt à tout pour étendre des mesures autoritaires. C’est cela qu’a cassé le Conseil d’État.

Une claque mais pas encore un recul

La décision de casser la dissolution prononcée par le gouvernement apporte une petite satisfaction. Les gouvernants bousculés à l’extérieur au Niger et désavoués à l’intérieur par le Conseil d’État, l’été de Macron aura été pourri. Même si cette décision est provisoire, car il s’agit d’une remise en cause de la dissolution en première lecture sur la forme et pas encore sur le fond. En bref, l’injustice a été repoussée pour un moment. Mais ce gain de temps a aussi montré le vrai visage des politiciens. D’un côté la gauche parlementaire se satisfait une fois de plus trop vite d’une victoire légale, sans se soucier de sa fragilité, qui ne pourra être qu’établie définitivement dans un rapport de force sur le terrain, dans la rue. De l’autre, le Rassemblement national a condamné la décision du Conseil d’État, au nom de l’ordre. Sans surprise, l’extrême droite soutient l’ordre des riches, des pollueurs, des multinationales et des banques qui ruinent des milliers de paysans. Leur vrai visage apparaît : de vulgaires porteurs d’eau des mêmes maîtres que ceux de Macron.

Les temps qui viennent

Une étude de l’Insee indique cet été que la population française a réduit de 11 % sa consommation alimentaire dans la dernière période. Dans ce pays la faim s’installe. Avec une inflation qui tutoie les 20 % sur certaines dépenses essentielles, des factures d’énergie en hausse et des salaires en berne, il n’y a rien d’étonnant. L’accès aux soins se dégrade par manque de structures publiques et accessibles. Voilà la société de Macron, et cela ne peut plus être caché. Alors, pour maintenir cette injustice, les promesses électorales, les mots creux des fausses mesures ne suffisent plus. C’est là que le tournant autoritaire trouve son sens réel.

La dissolution des groupes écologistes anticapitalistes est le complément nécessaire de la répression des militantes et des militants dans les entreprises, des manifestations, des blessés, des mutilés, des morts. Cette violence de la bourgeoisie est la seule réponse à l’explosion de la pauvreté qui fait face à l’explosion indécente des profits d’une minorité. Voilà le cœur du problème que ne pourra régler aucune sanction, même réjouissante, obtenue sur le terrain juridique. Aux tentatives de dissolution des groupes militants de résistance sociale comme les Soulèvements de la Terre – et il y en aura d’autres – il faut en finir avec les injustices de la société des riches et œuvrer au soulèvement de notre camp social pour dissoudre leur pouvoir.

Éditorial du NPA du 14 août