samedi 22 juillet 2023

ALGUES


 Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre 20 juillet 2023 lavarenn@yahoo.fr 06 12 74 34 56


Préjudice écologique : le déni est-il levé ?

 

 

 

 

 
Vous êtes sur la plage de l’Hôtellerie à Hillion, fermée au public depuis des semaines.


Comment rendre compatible l’invitation à découvrir ce patrimoine naturel exceptionnel avec
sa fréquentation dangereuse ? 

Comment afficher la protection de ce patrimoine
exceptionnel et passer sous silence sa disparition totale ? C’est parce qu’elle fait
disparaître la biodiversité que la putréfaction des algues vertes est la cause certaine de ce
danger pour l’homme.
Prises en flagrant déni. Les autorités publiques ont installé ces deux panneaux sans
vergogne ni remords sur la responsabilité qu’elles entretiennent dans cette situation
ubuesque et tragique.
Qu’est-ce qu’un préjudice
écologique ? « C’est une atteinte
non-négligeable aux éléments ou
aux fonctions des écosystèmes ou
aux bénéfices collectifs tirés par
l’homme de l’environnement ».
A la suite d’une requête de Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre, le Tribunal
Administratif de Rennes a rendu le 18 juillet son jugement : « Il résulte de ce qui a été
développé précédemment, que les atteintes portées à la biodiversité de la réserve
naturelle de la Baie de Saint-Brieuc par les amas persistants d’algues vertes
constituent un préjudice écologique, au sens des dispositions précitées à l’article 1247
du code civil ».
L’auteur de ces faits est clairement identifié par le Tribunal : « En conséquence, la
carence fautive du préfet des Côtes d’Armor dans la mise en oeuvre des pouvoirs qui
doivent permettre d’assurer la préservation effective de la biodiversité de la réserve
naturelle de la Baie de Saint-Brieuc doit également être regardée comme suffisamment
établie ».
En conséquence : « Il est enjoint au préfet des Côtes d’Armor de prévoir, dans un délai de
quatre mois à compter de la notification du présent jugement, des prescriptions,
applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement à l’origine
des fuites d’azote dans le milieu naturel, propres à limiter l’apport azoté total aux engrais aux
besoins des cultures afin de permettre une réduction effective du phénomène
d’eutrophisation, selon les seuils scientifiques, et de programmer un contrôle
périodique des l’ensemble des exploitations agricoles situées sur le territoire de la
réserve naturelle de la Baie de Saint-Brieuc ».
Préjudice
écologique : le
Tribunal
Administratif lève
le déni entretenu
depuis un demi-
siècle : oui, les
algues vertes
tuent bien la
biodiversité !
Quand la biodiversité meurt, l’homme est menacé.
Et les menaces ont déjà été mises à exécution…
Qu’implique ce jugement ?
Cette reconnaissance d’un préjudice écologique ouvre de nouvelles voies juridiques pour la
défense des victimes des marées vertes. Il sera plus difficile pour une cour de justice de
soutenir que la mort d’hommes ou d’animaux dans ces milieux, toxiques au point de
tuer toute forme de vie à cause de la putréfaction des algues vertes, ne soit pas la
conséquence de leur présence même passagère.
Il est aussi une sévère remise en cause de la gestion de la réserve naturelle de la Baie de
Saint-Brieuc dont le plan de gestion a été adopté pour la période 2019-2028 en passant
sous silence le préjudice écologique dans ces milieux naturels que ces gestionnaires
sont chargés de protéger.
D’une façon générale, il force les pouvoirs publics à lever le déni sur leur lourde
responsabilité dans la persistance de cette pollution toxique. De même, il rappelle après la
Cour des Comptes et la commission des finances du Sénat toutes les mesures inadaptées
des Plans Algues Vertes et le manque de contrôles règlementaires des exploitations
agricoles à l’origine des excédents d’azote et donc de la prolifération des algues vertes.
Enfin, les juges vont au-delà de simples condamnations jamais suivies d’effets. Ils enjoignent le préfet des Côtes d’Armor à agir sous quatre mois en instaurant un
programme de contrôles des exploitations agricoles. Ils exigent de lui des mesures
détaillées et des objectifs clairs sur la base de seuils scientifiques. Autrement dit, ils dénient
le droit à l’administration d’Etat de fixer des seuils de nitrates trop complaisants dans l’eau
des rivières qui débouchent dans la Baie de Saint-Brieuc. Et ces seuils sont bien plus
exigeants que la plus vertueuse Directive nitrates. Les chercheurs de l’IFREMER les ont
fixés à moins de 10 mg/l. Et pour les atteindre, dans ces bassins versants, ce ne sont pas
les pratiques qu’il faut changer, mais les systèmes agricoles.