samedi 15 juillet 2023

1953

   NI OUBLI, NI PARDON...

14 juillet 1953, la police tue

Sur ce sujet, le livre Les balles du 14 juillet 1953, de Daniel Kupferstein, La Découverte, 2017

Le 14 juillet 1953, il y a 70 ans, le PCF et la CGT organisaient leur propre défilé, habitude de l’époque issue du patriotisme stalinien de la Libération. Cette année là, en plus des protestations du cortège PCF-CGT contre la guerre coloniale française d’Indochine, 6 000 à 8 000 travailleurs algériens y étaient venus, à l’appel du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), le parti nationaliste de Messali Hadj, pour manifester pour l’indépendance de l’Algérie. Arrivé place de la Nation, le cortège des Algériens était chargé par la police pour lui arracher ses banderoles, et, face à la résistance des manifestants, la police ouvrait le feu. Sept morts, six Algériens et un Français, membre du service d’ordre de la CGT qui avait tenté de s’interposer, et plus d’une cinquantaine de blessés par balle.

Il n’y avait pas de vidéo à l’époque, mais plus de 60 balles ayant fait mouche et 200 douilles sur le terrain, selon le témoignage bien plus tardif d’un policier. Sur le champ c’était l’omerta. On ne trouva officiellement que dix-sept douilles : des policiers en civil avaient été envoyés aussitôt après la tuerie pour les ramasser et les policiers tireurs chargés eux-mêmes d’aller racheter individuellement chez des armuriers l’équivalent des munitions tirées, afin de mieux masquer les décomptes. Policiers en légitime défense, déclaraient les autorités et la presse. Pour l’Algérien abattu d’une balle dans le dos par exemple ? Le mensonge d’État était à l’œuvre. On connait ça.

Le chef du gouvernement, Joseph Laniel, était un homme de droite. Son ministre de l’Intérieur un radical-socialiste. Au rang de ministre d’État (grade de super-ministre à l’époque) l’éternel François Mitterrand, celui qui dira un peu plus tard « une seule négociation, la guerre » au début de l’insurrection algérienne (commencée le 1er novembre 1954), dont la manifestation des ouvriers algériens à Paris et les grèves qui ont suivi en Algérie pour dénoncer la répression de ce 14 juillet 1953 ne furent que des prémices.

Olivier Belin