Nouveau Parti Anticapitaliste Révolutionnaires comité Nathalie Le Mél
lundi 31 mars 2025
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L’heure serait donc à la guerre. Prétextant que Poutine est aux portes de l’Europe alors que son armée s’est enlisée en Ukraine, Macron annonce 68 milliards pour l’armée d’ici 2030. La Commission européenne a, quant à elle, autorisé 800 milliards de dépenses militaires supplémentaires. Produire un avion Rafale coûte au moins 160 millions, dix fois plus qu’une école ou un bloc opératoire. L’austérité ce n’est pas pour tout le monde : il n’y a plus d’argent pour nos vies, mais il y en aurait pour la mort ?
Un système de guerre permanente
Dans le système capitaliste, la guerre est permanente. Aujourd’hui, elle ravage l’Ukraine, la Palestine, la République démocratique du Congo, la Syrie ; hier, l’Irak, l’Afghanistan, et des dizaines de guerres nous séparent encore de celles du Vietnam ou d’Algérie il y a un demi-siècle.
Trump, Macron, Poutine : aucun dirigeant capitaliste ne veut la paix. Leur unique but est d’étendre leur puissance, de mettre la main sur les ressources minières, comme en Ukraine ou d’assurer aux promoteurs immobiliers l’accès à des marchés de reconstruction, comme à Gaza. Et bien sûr, de faire exploser les bénéfices des industries de l’armement. Les drames des uns sont les aubaines des marchands de mort. Ni les politiciens ni leur prétendu droit international n’y mettront fin. Le capitalisme, c’est la concurrence, la loi du plus fort.
Guerre, nationalisme, racisme : un triptyque perdant pour les exploités
Mais les plus forts, ce sont bien les travailleurs et travailleuses, qui font tourner la société et n’ont aucun intérêt commun avec les entreprises qui les exploitent ici et profitent des guerres là-bas.
Pour chercher à nous diviser, les Retailleau, Darmanin, Le Pen, Bardella utilisent comme toujours leur arme favorite : la stigmatisation des musulmans, et en réalité des travailleurs originaires des anciennes colonies. Leur dernière obsession, interdire les pratiques sportives aux femmes voilées, sous prétexte d’« entrisme islamiste » dans le sport. Un amalgame de plus, tout comme celui qui voudrait confondre antisionisme, c’est-à-dire lutte contre le colonialisme israélien, et antisémitisme.
Mais ce piège ne prend pas ! Les manifestations contre le racisme et l’extrême droite du 22 mars dernier ont été des succès dans de nombreuses villes. La solidarité s’exprime aussi au quotidien, comme avec les jeunes mineurs isolés, que l’État et les pouvoirs publics s’acharnent à réprimer et à mettre à la rue.
Les divisions nationalistes et racistes sont autant de poisons qui permettent à la classe dominante de s’en prendre d’abord aux uns, les plus fragiles, qui assurent les boulots les plus pénibles, pour mieux écraser tout le monde à la fin. En Floride, aux États-Unis, les soutiens de Trump voudraient désormais remplacer les travailleurs immigrés par… des enfants et des adolescents !
Aller au-delà des mobilisations ponctuelles
Nous sommes nombreux à avoir la rage et l’envie d’en découdre avec le gouvernement, le patronat, leurs attaques et leur système. Une partie de la jeunesse étudiante se mobilise ces dernières semaines contre les coupes budgétaires dans les facs, exigeant du fric pour les universités plutôt que pour l’armée.
Mais quelques mobilisations et journées de manifestations ne suffisent pas : nous avons besoin d’un affrontement d’ensemble. Ni les partis de gauche, ni les directions syndicales ne cherchent à le préparer. Tous acceptent même le principe de l’effort de guerre, cherchant, au mieux, à l’amender pour mieux répartir les efforts avec les plus riches.
Affirmons au contraire que les guerres, l’armée et le drapeau des capitalistes français ne sont pas les nôtres. Non à l’union nationale : si tu veux la paix, n’aide pas les capitalistes à préparer la guerre !
Éditorial du NPA-Révolutionnaires du 31 mars 2025
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Champs de bataille : l’histoire enfouie du remembrement, bande dessinée d’Inès Léraud et Pierre Van Hove
- Publication le
Champs de bataille : l’histoire enfouie du remembrement
Bande dessinée d’Inès Léraud et Pierre Van Hove
éditions Delcourt (La revue dessinée)
Après Algues vertes, l’histoire interdite, qui dénonçait les méfaits de la pollution de l’agrobusiness sur l’environnement, Inès Léraud, journaliste indépendante, propose une nouvelle enquête sur une histoire souvent méconnue qui a bouleversé le paysage de nos campagnes : le remembrement.
Les acteurs du remembrement ont profondément modifié le paysage mais pas seulement, c’est aussi un plan social, parmi les plus importants qu’ont connu la France.
Entre 1946 et 1974, la population paysanne passe de 7 millions à moins de 3 millions de personnes. Après 1945, l’État a initié une politique de confiscation et redistribution des terres ; les surfaces cultivables se sont agrandies ; la mécanisation et l’utilisation des engrais chimiques s’est accélérée ; les villages se sont transformés et la main-d’œuvre agricole envoyée dans les usines.
Dans l’idée de ses promoteurs et des ingénieurs, l’objectif de ce bouleversement était de créer un outil de production, la terre, qui allait pouvoir être rentable et permettre l’exportation, notamment de céréales. Il fallait à tout prix augmenter les rendements et « nourrir la population ».
Le remembrement a permis et encouragé le développement d’une agriculture productiviste dont on voit aujourd’hui les limites : dépendance aux produits phytosanitaires, aux marchés et aux subventions.
Il s’est parfois effectué dans la douleur, la résistance et la contestation comme à Trébrivan (Côtes-d’Armor) en Bretagne. L’État a alors demandé aux « forces de l’ordre » de rosser les récalcitrants. Les CRS étaient présents en permanence sur la commune. Pendant toutes ces années, les femmes souvent en tête dans les manifestations selon les rapports de gendarmerie et des renseignements généraux, n’apparaissent pas dans les archives, sans doute parce que la presse leur donnait rarement la parole. Elles ont cependant été très actives lors des mobilisations et des actions engagées.
Quelques attentats du Front de libération de la Bretagne (FLB) contre les entreprises de matériel agricole ont ponctué ces années de luttes.
Le remembrement a souvent bien servi en terres les paysans les plus riches ou proches du pouvoir. Encore aujourd’hui, dans les villages, certaines familles marquées par des inégalités de redistribution ne se parlent pas. La plupart des communautés villageoises garde en mémoire le positionnement des familles. Les pour et les contre…
Inès Léraud, conseillée par Léandre Mandard (qui prépare une thèse sur le remembrement), s’appuie sur des recherches précises, des rencontres avec des paysans mais aussi le ministre Edgard Pisani, ou René Dumont avant qu’il ne devienne écologiste. Cette enquête a demandé quatre ans de travail pour documenter un phénomène social et politique peu traité et ses conséquences : des ravages environnementaux, la disparition des haies, de la biodiversité, des modifications du tracé de cours d’eau. Mais aussi des drames humains, suicides, divorces, exode rural.
On retrouve Pierre Van Hove au dessin et Matilda aux couleurs. Le dessin illustre parfaitement les témoignages, les paysages, le portrait des différents acteurs. Un dossier d’archives dense et passionnant complète l’album. On y trouve des témoignages écrits, des demandes de recours lorsque le fermier est lésé par la redistribution des terres ou que son verger en production est détruit par les bulldozers.
Aujourd’hui, le massacre se perpétue, on continue à détruire des centaines de kilomètres de haies, plus de 20 000 kilomètres par an ! Il est plus que temps de changer les pratiques agricoles.
Une lecture indispensable à la compréhension de notre environnement, de nos paysages et des décisions politiques qui ont conduit à ce grand chambardement.
Jeanne Travers, le 28/03/2025
vendredi 28 mars 2025
tunis
Tunisie : répression et populisme, les naufrages d’un pays qui criminalise la solidarité
- Publication le
Le 17 mars 2025, les garde-côtes tunisiens revendiquent le sauvetage de 612 migrantes et migrants. Simultanément, dans un communiqué, la direction de la garde maritime se félicitait d’avoir, la même nuit, réussi « à faire échouer plusieurs tentatives séparées de rallier clandestinement l’espace européen ». Quoi d’étonnant qu’il n’y ait pas un mot de compassion sur les dix-huit personnes, dont des enfants, qui ont perdu la vie. Car bien plus que de sauvetage en mer, c’est de la chasse aux migrants et de l’interception des embarcations de fortune sur lesquelles ils tentent de rejoindre l’Europe, que la garde maritime tunisienne est chargée.
Elle n’en est pas chargée seulement par décision du président tunisien Kaïs Saïed, mais par celle de l’Union européenne : en juillet 2023, celle-ci a signé pour cela un partenariat avec la Tunisie, lui accordant en échange une aide économique de 150 millions d’euros, plus un financement de 105 millions pour couvrir les frais de l’interception des migrants et du renvoi vers le sud de ceux qui viennent d’Afrique subsaharienne.
Une tragédie de plus dans l’indifférence générale, ou pire, dans un cynisme et racisme décomplexé
Indifférent au sort de ces hommes, femmes et enfants qui luttent contre les vagues dans l’espoir d’un avenir meilleur, le président tunisien, Kaïs Saïed, continue son discours obsessionnel sur le « grand remplacement » et sa politique du « retour volontaire », exigeant une évacuation « plus efficace ».
Comprendre : expulser les migrants subsahariens plus vite, plus loin, peu importe où, tant qu’ils disparaissent du paysage tunisien et européen. Dans la Tunisie verrouillée par Saïed, les seules personnes qui tentent encore de protéger les plus vulnérables de ce monde se retrouvent derrière les barreaux. Saadia Mosbah, militante antiraciste et présidente de l’association Mnemty, croupit en prison depuis plusieurs mois. On l’accuse de blanchiment d’argent, de faciliter l’immigration clandestine – en réalité, on l’accuse d’être une voix de la lutte antiraciste en Tunisie. Et elle n’est pas seule, Sherifa Riahi, ancienne dirigeante de Terre d’asile Tunisie à Sfax, se trouve aussi actuellement derrière les barreaux. Tout comme Mustapha Djemali, fondateur du Conseil tunisien pour les réfugiés (CTR).
D’autres activistes, avocats, bénévoles, journalistes, font les frais de cette machine répressive qui criminalise la solidarité. Défendre les Noirs en Tunisie, documenter les violences policières, aider un migrant à ne pas mourir de faim, c’est risquer la prison, la diffamation, le harcèlement. L’État veut faire taire ces voix, les briser, leur coller une étiquette d’ennemis de la nation. La criminalisation de l’aide aux migrants – comme on a pu la voir s’appliquer aussi en France avec le délit de solidarité – a pour objectif de fragiliser encore plus les réfugiés pour les dissuader de quitter leurs pays ou, ici, les pousser à accepter la politique tunisienne de « retour volontaire ».
Sfax, camp de l’oubli, terrain de la haine
À Sfax, ville portuaire de l’Est tunisien, après les expulsions massives de l’été dernier, où des centaines de subsahariens avaient été jetés en plein désert à la frontière libyenne, la situation n’a fait qu’empirer. Les bidonvilles se multiplient, dans une précarité inimaginable. Pas d’eau, pas de nourriture, pas de soins. Les migrantes et migrants survivent dans l’ombre, terrorisés, à la merci du racisme grandissant dans la population, des passeurs et des trafiquants.
Un récent rapport européen documente d’ailleurs la complicité du gouvernement tunisien, de la garde nationale et de l’armée dans un vaste réseau de trafic d’êtres humains. Ces faits graves, documentés, sont balayés d’un revers de main par le gouvernement : « Fausses informations », « complot occidental », répond-on à Tunis. Pendant ce temps, les corps s’accumulent.
Une politique gouvernementale raciste mûrement réfléchie
Cette horreur ne tombe pas du ciel. Elle est le produit d’un pouvoir qui a trouvé dans le racisme, la xénophobie et l’autoritarisme sa recette politique pour maintenir sa population loin de la révolte. Kaïs Saïed, depuis son coup de force en 2021, n’a cessé d’étouffer les institutions, la liberté d’expression et toute forme d’opposition politique.
Un discours, calqué sur celui de l’extrême droite européenne, où la question migratoire devient un écran de fumée idéal pour masquer une crise bien plus profonde. Chômage record, inflation galopante, pénurie de produits de base… Le pays s’enfonce, et plutôt que de répondre à l’urgence sociale, le pouvoir préfère détourner la colère populaire vers les Noirs, avec ou sans papiers, comme boucs émissaires.
Avec l’appui de l’Union européenne, trop contente de trouver en Kaïs Saïed un garde-côte et de profiter pour ses entreprises sous-traitantes des bas salaires du pays. Tant que la Tunisie « tient sa frontière », elle est un partenaire « fiable ». Le pays s’enfonce dans un autoritarisme brutal, les libertés s’effacent, la misère s’accroît, la peur gagne du terrain. Ce qui s’y joue dépasse ses frontières. Il y a urgence à briser ce silence, à combattre cette mécanique de la haine raciste, de la violence et de la répression.
Nora Debs
Lire aussi, notre article de février 2025 : Tunisie-Libye : le trafic d’État des migrants, une machine à broyer les vies financée par l’Europe