dimanche 17 mai 2020

antika

Dans l’État espagnol, Anticapitalistas sort de Podemos


Communiqué de “Anticapitalistas”

Le 28 mars dernier s’est terminé un processus de consultation interne au cours duquel Anticapitalistas, a décidé de quitter Podemos, avec une participation de 79% des militantEs, 89% de votes pour, 3% de contre, et 7,5% d’abstentions. Nous avons décidé d’attendre jusqu’à aujourd’hui pour le rendre public : notre priorité a été de prêter attention à la pandémie COVID-19 qui frappe durement le pays et qui affecte fondamentalement les secteurs les plus vulnérables des classes populaires.
Pour nous, co-fondateurs de cette organisation, ce fut une expérience collective pleine d’intérêt qui fera toujours partie de notre histoire ainsi que de l’histoire de Podemos. Les objectifs qui nous ont poussés à participer à la fondation de cette organisation sont connus de tout le monde. Il fallait constituer un sujet politique large et radicalement démocratique, fortement lié aux luttes et aux mouvement sociaux, capable de mettre en cause le pouvoir économique, culturel et politique des élites et de faire face aux effets d’un néolibéralisme agressif et incontrôlé. Avec la vocation, bien sûr, de penser et de construire une alternative politique globale au capitalisme écocide et patriarcal.
Nous pensons que ces objectifs sont toujours d’actualité mais qu’aujourd’hui Podemos a cessé d’être l’espace à partir duquel Anticapitalistas peut contribuer à les porter. Nous avons affirmé nos positions à plusieurs reprises et les avons fraternellement mises en débat avec celles des autres courants de la gauche. Malheureusement, Podemos n’est pas aujourd’hui l’organisation que nous aspirions à construire au début : le modèle organisationnel et le régime interne basés sur la centralisation des pouvoirs et les décisions au sein d’un petit groupe de personnes liées aux postes publics et au secrétariat général, laissent peu d’espace pour le travail collectif pluraliste. Par ailleurs c’est évidemment un modèle qui s’est absolument avéré inefficace pour progresser sur le terrain social. L’organisation militante et la force qui, d’en bas, animait Podemos à ses débuts se sont diluées, désorganisées et évaporées, sans que cela se soit traduit, selon la justification qui en fut donnée, par une amélioration des résultats électoraux.
D’autre part, Podemos est né comme un mouvement politique en opposition aux normes économiques et politiques du système. Or il est évident que la stratégie a changé. Pour Podemos, le “possible” s’est peu à peu réduit durant ces années : de notre point de vue, la tâche reste toujours de rendre possible le “nécessaire”. Le point culminant de cette dérive est la stratégie de co-gouvernement avec le PSOE. Une fois de plus, un projet de gauche est subordonné à court terme à la logique du moindre mal, acceptant de renoncer à ses politiques en échange d’une faible influence, non décisive sur le Conseil des ministres. Malgré la propagande gouvernementale, les politiques de la coalition ne rompent pas avec le cadre économique orthodoxe, elles ne misent pas sur la redistribution des richesses, ni sur le renforcement radical du secteur public et sur la désobéissance aux institutions néolibérales. Bien entendu, nous soutiendrons toutes les conquêtes qui se produiraient dans ce cadre et ensemble nous lutterons contre l’extrême droite. Mais dans un contexte de crise systémique profonde, nous croyons qu’un engagement à faire avancer la démocratie et la justice sociale passe nécessairement par la construction de forces sociales, de politiques ambitieuses et par la préparation d’un affrontement contre les élites.
Les mois et les années à venir seront le théâtre de grandes batailles entre les classes. La crise en cours n’est pas conjoncturelle : c’est une crise systémique, économique, écologique et des soins. Elle impliquera des réalignements politiques, culturels et sociaux majeurs. Rien de ce que nous croyons aujourd’hui sûr ne se maintiendra à l’identique. Notre engagement pour la construction d’un mouvement anticapitaliste, ouvert à toutes sortes de luttes et d’expériences, nous permet de regarder l’avenir d’une manière ouverte et il ne fait aucun doute que nous nous retrouverons dans de nombreuses luttes communes avec les gens de Podemos.
Dès que la situation socio-sanitaire nous le permettra, nous organiserons une conférence politique de Anticapitalistas pour débattre en profondeur de nos propositions pour la nouvelle étape. 
14/05/2020