samedi 28 octobre 2017

Ouest France

             Usine Synutra à Carhaix. 

« On ne peut rien dire, par peur de se faire virer »

  • Les délégués CGT de Synutra étaient présents, mais aussi des responsables du syndicat extérieurs à l’entreprise.
    Les délégués CGT de Synutra étaient présents, mais aussi des responsables du syndicat extérieurs à l’entreprise. | Tony LE PENNEC
Les salariés de Synutra se sont réunis hier soir à Carhaix, à l’invitation de la CGT, pour parler de leurs conditions de travail. L’incitation à la délation et le copinage ont notamment été évoqués. 


Témoignages.
Suites aux articles de presse révélant des conditions de travail souvent déplorables chez l’entreprise de lait en poudre Synutra, la CGT appelait hier soir les salariés à une réunion. Une cinquantaine de personnes se sont donc réunies dans les locaux du syndicat. Si pour l’instant, aucune décision concernant des actions précises n’a été prise, les salariés ont pu vider leur sac, et partager des expériences souvent similaires d’un service à l’autre.

 Avancement par copinage

« L’évolution, ça ne marche que par copinage. Dans mon service, les chefs sont des potes de la direction. Il n’y a que comme ça qu’on avance, jamais en fonction des qualités personnelles, ou de son travail. Mais on ne peut rien dire, parce qu’on a tous peur de se faire virer. Le matin, on ne sait même pas si la porte va s’ouvrir quand on va badger », témoigne ainsi une employée.

« Ils veulent qu'on dénonce »

« Pendant l’entretien d’embauche d’un intérimaire de mon service, la direction lui a demandé « Si tu as un collègue qui ne fait rien, qu’est ce que tu fais ? ». L’intérimaire a répondu qu’il le ferait gentiment remarquer à la personne en question, mais ce n’était pas ça que la direction voulait entendre, ce qu’ils veulent c’est qu’on dénonce », poursuit une autre.

« Entretien annuel de délation »

Une ambiance générale de suspicion qui fait dire à un autre participant que « les entretiens annuels d’évaluation, c’est devenu les entretiens annuels de délation. »« Les petits chefs essayent discrètement de nous faire dire des choses, par exemple on nous demande l’air de rien « Untel il va bien ces temps-ci ? Il bosse bien tu trouves, il ne sort pas trop souvent fumer ? »

Mis à la porte sans raison 

D’anciens travailleurs de l’entreprise étaient également présents à la réunion, et ont pris la parole. « J’ai travaillé six mois en intérim à Synutra, puis je me suis fait mettre à la porte du jour au lendemain. J’ai essayé de comprendre pourquoi, mais tout le monde se défaussait, je n’ai jamais eu de réponse. Et plus tard un ancien collègue me dit « c’est parce que ta gueule ne revenait pas à Untel ». J’ai 55 balais et je me retrouve sans travail sans raison, je l’ai en travers de la gorge », s’insurge l’un d’eux.

Intérimaires valables mis dehors

« On a beaucoup de personnel valable en intérim, mais ils nous les enlèvent du jour au lendemain, sans jamais qu’on sache pourquoi », abonde une collègue encore dans l’entreprise.

Nouvelle réunion prévue

Face à tous ces témoignages, les membres de la CGT, salariés à Synutra ou extérieurs à l’entreprise, ont félicité les participants pour leur courage, et les ont incités à se syndiquer pour mieux lutter.Une nouvelle réunion est également prévue vendredi prochain, toujours à 17 h à la maison des syndicats, pour réunir ceux n’ayant pas pu être présents hier soir à cause de leurs horaires de travail.